Synopsis
«En 1899, une colonne de Soudanais enrôlés, habillés et armés par le colonialisme français descend les routes du sud de l'Afrique sous la conduite d'une poignée d'officiers blancs.Toute velléité de résistance autochtone est réduite par une politique de terre brûlée et de massacres organisés. Au loin, un état-major, tout de même inquiet par cette pratique un peu trop voyante des bienfaits de la civilisation européenne, tente de freiner les ardeurs du capitaine Voulet en mandatant un colonel chargé de reprendre en main cette course sanguinaire. Face à cette horde sauvage à l'irrépressible force de frappe composée d'un canon et de bons fusils, l'Afrique des royaumes et des divisions tribales se dissout. Seule se détache de la couardise ou du vain calcul l'intransigeance de Sarraounia, chef guerrier et grande prêtresse des Aznas. C'est sur elle que buteront les rêves de conquête du capitaine fou.(…) L'anecdote, puisée par Med Hondo dans les archives de l'ancien ministère des Colonies, prend dès lors valeur d'exemple et de symbole. Presque un contre-exemple qu'il aurait fallu suivre si l'on connaît le combat que mène le cinéaste d'origine mauritanienne, déjà à travers ses premiers longs métrages « Soleil Ô » et « Les Bicots nègres, vos voisins», plaidant pour l'identité culturelle africaine, tempêtant aussi contre une réalité post-coloniale le plus souvent amollie par les structures politiques à la recherche d'intérêts bien différents. (…) « Sarraounia » agit en quelque sorte à contre-courant, pose sa pierre historique sur une architecture qu'il reste encore à élever. Afin que l'Afrique, enfin, puisse s'y reconnaître.» Extrait de la critique de Claude Sartirano dans l'Humanité Dimanche, 23 novembre 1986.
Supplément
Entretien avec Françoise Vergès autour du film
Med Hondo
Né en 1936 en Mauritanie, Med Hondo arrive à Marseille en 1958. Là commence une vie de petits boulots, une prise de conscience politique et le développement d'une passion pour l'art dramatique et le cinéma. Après avoir réalisé deux courts-métrages, il entreprend le tournage de Soleil Ô (1970), film tourné durant les week-ends. Malgré ces contraintes techniques, ce premier long-métrage démontre la maîtrise cinématographique du réalisateur et une réflexion forte sur la désillusion d'un immigrant africain confronté au racisme ordinaire à Paris. Ce film préfigure déjà les thématiques de l'oeuvre de Med Hondo, qui questionne et met à mal les rapports entre les peuples Africains et leurs anciens colonisateurs. West Indies - les nègres marrons de la liberté (1979) illustre cette problématique au travers d'une comédie musicale sur la traite des esclaves et sur l'asservissement des populations antillaises à la culture européenne. C'est aussi l'émancipation des peuples d'Afrique qui se trouve au coeur du cinéma de Med Hondo. Polisario : un peuple en armes (1978) et Nous aurons toute la mort pour dormir (1977) documentent la lutte armée du Front Polisario pour l'indépendance du Sahara Occidental. Dans Sarraounia (1986), Med Hondo évoque la vie de la reine africaine du même nom ayant résisté avec son peuple face aux massacres perpétrés par les colonisateurs de la sanglante mission Voulet-Chanoine à la fin du XIXe siècle au Niger. Depuis le dépôt de sa filmographie et de ses archives en 2015, Ciné-Archives gère les droits de diffusion de ses films et oeuvre à leur conservation et à leur valorisation. En 2017, Soleil Ô a été restauré par la Film Foundation de Martin Scorsese, au laboratoire l'Immagine Ritrovata à Bologne, ouvrant la voie à une redécouverte de ce cinéaste profondément imprégné d'une culture marxiste. West Indies et Sarraounia ont été restaurés par le Harvard Film Archive, en collaboration avec Ciné-Archives.
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